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Intervention de la Secrétaire Générale lors du 4ᵉ Forum Diplomatique d'Antalya

Tout d’abord, je tiens à exprimer ma profonde gratitude pour l’invitation et l’opportunité de participer à ce Forum particulièrement pertinent, surtout à un moment où le monde fait face à des crises interconnectées et à un changement imminent dans la dynamique géopolitique, avec des effets déjà ressentis sur les plans économique, social et environnemental.

Depuis l’Amérique latine et les Caraïbes, et plus particulièrement depuis la Grande Caraïbe, nous ne voyons pas ce scénario uniquement comme un ensemble de défis, mais aussi comme une fenêtre d’opportunité. Une opportunité de construire des partenariats stratégiques qui renforcent notre résilience et nous permettent d’avancer vers un développement véritablement durable — sans compromettre notre souveraineté ni notre autonomie.

Dans un paysage géopolitique mondial marqué par des tensions, la région doit agir avec prudence, mais aussi avec pragmatisme. Nous sommes une région de paix dans un monde marqué par la confrontation, et c’est une force que nous devons préserver et projeter. Sur cette base, nous pouvons attirer des investissements durables, promouvoir l’échange de connaissances et soutenir des projets stratégiques qui génèrent une vraie valeur pour nos populations, toujours dans le plein respect de l’environnement, tout en renforçant nos industries, notre tourisme et notre culture.

Des partenariats uniques et stratégiques. Malgré les défis posés par un ordre mondial en mutation, c’est le moment de diversifier nos alliances et de réexaminer nos modèles de coopération sous un prisme qui place la dignité et la justice sociale au centre. Il est urgent de favoriser des partenariats qui évitent de nouvelles formes de dépendance et de promouvoir des schémas de coopération Sud-Sud et triangulaires qui développent les capacités, facilitent le transfert de connaissances et soutiennent des projets multi-pays générateurs de bien-être partagé.

Le potentiel de la Grande Caraïbe. Nous sommes une région unique. Comme je l’ai mentionné, une région de paix mais aussi riche en ressources naturelles et en diversité culturelle. Cette combinaison nous positionne comme un acteur stratégique sur la scène mondiale et un modèle de coexistence capable d’offrir des solutions dans un monde fragmenté. Plus que jamais, le potentiel de la Grande Caraïbe doit être reconnu et soutenu.

L’aspiration au développement durable est un objectif partagé et une nécessité urgente pour de nombreux pays de la Grande Caraïbe, où la résilience climatique et la justice environnementale ne sont pas seulement des priorités politiques mais des questions de survie. Les adresser exige des investissements qui ne soient pas seulement rentables pour l’Amérique latine et les Caraïbes, mais pour le monde entier.

Un partenariat économique renforcé avec l’Europe peut améliorer la position globale de la région, élargir l’accès à la technologie et au capital, et réduire la dépendance à un seul partenaire extérieur, posant ainsi les bases d’économies plus résilientes et diversifiées.

D’autre part, cette nouvelle approche de l’UE offre une opportunité précieuse de mettre en valeur les forces de notre région et d’élargir la coopération interrégionale. Cependant, il est crucial de reformuler les termes de cette relation afin qu’ils correspondent aux réalités et aspirations de l’Amérique latine et des Caraïbes, fondées sur la justice économique et la souveraineté, et dépassent les dynamiques de dépendance dépassées qui ont trop longtemps défini la place de la région dans l’économie mondiale.

Concernant l’Accord de libre-échange UE–Mercosur : bien qu’il puisse bénéficier à certains pays de la région, tout accord de ce type doit être accompagné d’engagements sincères en matière de durabilité et de droits des communautés, afin de soutenir la transformation régionale sans reproduire la dépendance ni privilégier le profit à tout prix.

Des initiatives comme Global Gateway, qui mettent l’accent sur les valeurs démocratiques, la durabilité, la transparence et le bénéfice mutuel, montrent comment un virage vers des partenariats stratégiques plus profonds peut nous faire dépasser les modèles traditionnels de commerce et d’aide, et répondre à des besoins urgents tels que l’énergie verte, la transformation numérique et l’inclusion sociale. Elles fixent de nouvelles références pour remodeler les dynamiques économiques mondiales et régionales.

Le monde est en train de subir une série de transformations, et l’Amérique latine et les Caraïbes n’y échappent pas. Politiquement, la région a cherché à renforcer l’intégration, améliorant son pouvoir de négociation collectif dans le système international pour répondre à des défis communs tels que le changement climatique, la sécurité alimentaire et le commerce équitable. L’impact des changements globaux sur notre région dépendra de notre capacité à négocier depuis l’unité, avec autonomie et une vision du développement centrée sur les personnes.

D’un point de vue économique, la CEPAL a alerté notre région sur le « piège de la faible croissance », qui limite notre capacité à combler les écarts structurels. À cela s’ajoutent des défis tels que la croissance du secteur informel, qui affecte de manière disproportionnée les jeunes, les femmes et les communautés rurales, ainsi que les effets persistants de la pandémie et des événements climatiques extrêmes, qui ont tous creusé les inégalités structurelles et la pauvreté dans plusieurs pays.

À la lumière de cela, repenser les partenariats requiert de nouvelles dynamiques qui favorisent une croissance inclusive et réduisent les inégalités. Une condition fondamentale est que ces alliances aident les pays à sortir des cycles agressifs d’endettement. Il est urgent d’éviter de retomber dans des politiques commerciales protectionnistes souvent issues du Nord global, et plutôt de diversifier les partenariats et renforcer la coopération Sud-Sud.

Dans ce contexte, il est également essentiel d’utiliser des stratégies telles que le friendshoring, le nearshoring et les partenariats public-privé, pour avancer vers la récupération de la souveraineté économique, attirer des investissements durables et générer plus et meilleurs emplois. La région doit saisir ces outils pour construire des économies plus justes et résilientes.

L’Amérique latine et les Caraïbes entretiennent des relations dynamiques avec de nombreux acteurs mondiaux, comme il se doit dans un monde globalisé. Bien que ces relations comportent certains risques, ceux-ci peuvent être minimisés si nous restons concentrés sur la construction de partenariats fondés sur le respect mutuel et la souveraineté. Parallèlement, ces relations offrent de vastes opportunités. Notre région possède un potentiel énorme, ce qui nous place en position de rechercher des partenariats plus forts, stratégiques et diversifiés qui servent nos propres priorités de développement durable.

Concernant les processus électoraux, notamment dans un pays comme les États-Unis, il est clair qu’ils ont des implications. Cependant, cette région croit fermement que l’intégration, la diplomatie et le multilatéralisme doivent être la réponse. Nous ne pouvons plus continuer à fonctionner sous la logique d’un monde unipolaire. Il est clair que nous allons vers une nouvelle dynamique de gouvernance mondiale vers la multipolarité. C’est depuis cet espace que nous devons affronter et naviguer ces impacts.

Dans ce contexte, des initiatives telles que le Forum CELAC–Chine sont devenues des plateformes clés pour le dialogue politique et la coopération globale, renforçant le multilatéralisme comme outil pour répondre aux défis évolutifs de la région. La relation avec la Chine a apporté des opportunités significatives, notamment à travers des initiatives comme la Ceinture et la Route, qui ont soutenu des investissements non seulement dans les infrastructures physiques mais aussi dans la connectivité numérique, énergétique, éducative, financière et culturelle.

Un point qu’il ne faut pas négliger est celui-ci : le présent et l’avenir de cette importante région ne peuvent être déterminés par les changements politiques dans un seul pays, aussi puissant soit-il, ni par les tensions entre grandes puissances. Ils doivent plutôt être définis par notre capacité à construire des partenariats stratégiques qui portent une agenda de développement durable ancré dans les personnes, l’égalité, les droits humains et le bien-être. Depuis l’AEC, nous réitérons notre engagement envers une diplomatie efficace qui contribue à une architecture internationale plus juste et coopérative.

L’intégration régionale n’est pas simplement une option technique ou économique, c’est une décision profondément politique et stratégique, et plus nécessaire que jamais. Pour l’Amérique latine et les Caraïbes, elle représente une réelle opportunité de construire une souveraineté collective, une plus grande résilience, et un modèle de développement centré sur la vie et la dignité humaine.

Et nous sommes sur ce chemin. Des mécanismes comme la CELAC, la CARICOM, le SICA, le SELA et l’AEC ont démontré que la coopération régionale est non seulement possible, mais qu’elle donne des résultats. Dans un contexte de fragmentation économique et de tensions globales, renforcer nos liens et nos efforts collectifs pour bâtir une région plus cohésive, résiliente et influente à l’international est l’un de nos outils les plus puissants.

La Grande Caraïbe, avec sa diversité, son engagement pour la paix et son immense potentiel en ressources naturelles et culturelles, est un modèle concret de coopération en action. Cette année, la Colombie accueillera le Sommet des Chefs d’État et de Gouvernement de la Grande Caraïbe, sous le thème : « Unis pour la vie, pour le développement durable de la Grande Caraïbe », un appel clair à projeter, depuis la Caraïbe, une vision partagée pour l’avenir de toute l’Amérique latine et du monde.

À l’AEC, nous croyons que la diplomatie et le multilatéralisme ne doivent pas rester des exercices rhétoriques déconnectés des réalités de nos peuples. Les peuples ne mesurent pas le succès de la diplomatie par des communiqués conjoints ou des accords signés, mais par des améliorations réelles dans leur vie. C’est pourquoi nous réaffirmons notre engagement à démontrer que la diplomatie et le multilatéralisme restent des outils puissants pour changer le monde et affronter les défis globaux par la coopération, la solidarité et la responsabilité partagée. Notre région a une voix, des propositions, et un héritage qui la positionnent comme un acteur clé contribuant à un système de gouvernance mondiale plus juste.

Je vous remercie beaucoup.


 

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