L’importance des statistiques et de la géographie pour le développement

Dans les pays en développement, tirer une personne de la pauvreté et améliorer la position du pays a été pendant longtemps un défi auquel les gouvernements ont dû faire face, et la Grande Caraïbe n’est pas l’exception. Bien qu’il y ait eu certaines réussites, en particulier en matière de réduction de la pauvreté, en général, le mouvement complet des indicateurs des pays a échappé à la plupart des gouvernements.  A partir de la formulation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), un accent plus intense a été mis sur le mesurage des résultats, pour guider le développement de politiques et la réduction de la pauvreté. Aujourd’hui, on examine le rôle de la géographie et l’utilisation des statistiques dans l’orientation vers les résultats du développement.

 

Nous vivons dans une société mondiale de l’information, où la quantité et le flux d’information dans la société ne cessent d’augmenter. Bien de gens reconnaissent actuellement que les statistiques jouent un rôle majeur en façonnant et fournissant de l’information scientifique, utile à tous les aspects de la vie humaine.  La prise de décisions moderne, que ce soit au sein d’un gouvernement national ou d’une agence internationale, utilise de plus en plus des méthodes statistiques afin d’améliorer la qualité de l’information.    

 

Cette appréciation croissante du rôle, du pouvoir et de l’importance des statistiques, conduit maintenant à accorder une plus haute priorité au développement des capacités statistiques, dans de nombreux pays en développement. Les Nations Unies ont établi un “ Groupe de Haut niveau sur l’agenda de développement de l’après 2015”, qui dans son rapport intitulé Un partenariat mondial renouvelé pour le développement : éliminer la pauvreté et transformer les économies moyennant le développement durable,” décrit, entre autres choses, un programme universel pour éliminer la pauvreté extrême de la face de la terre en 2030, et réalise la promesse d’un développement durable.   Le rapport appelle à une révolution des données pour le développement durable, avec une nouvelle initiative internationale pour améliorer la qualité des statistiques et de l’information accessible aux citoyens.

 

Malgré le consensus international sur l’importance de statistiques nationales fiables, de nombreux pays en développement n’ont pas de systèmes statistiques nationaux solides et croyables, nécessaires à appuyer les processus de développement.   Les statistiques inappropriées ont toujours été une limitation importante pour les études réalisées sur les économies caribéennes.  Pour corriger ce problème de la pauvreté des données, la région caribéenne a été souvent décrite à partir de nombreuses perspectives divergentes. En mai 2012, la Commission économique des Nations Unies pour l’Amérique latine et les Caraïbes  (CEPALC) a souligné le fait que les pays de la Caraïbe continuent de s’efforcer pour améliorer leurs compétences statistiques.  Des progrès ont eu lieu dans le domaine des statistiques économiques, mais il existe encore des lacunes importantes dans tous les autres domaines des statistiques.  Toutefois, l’amélioration des statistiques ne va pas résoudre de par elle-même la myriade de problèmes auxquels fait face la région.

 

Ayant compris que l’emplacement et l’endroit constituent une composante fondamentale pour une prise de décisions efficace, la géoinformatique, connue aussi comme la science de l’information géographique (GIS), devient un domaine qui se développe rapidement.  Elle implique l’application de techniques pour la mise en mémoire, le classement, la représentation et l’analyse de données, pour pouvoir être utilisées de manière efficace. .

 

En matière de réduction des risques, la liaison de la GIS avec la cartographie des risques, implique la superposition d’un nombre complexe d’ensemble de données sur l’environnement, la propriété foncière, l’utilisation des terres et le transport, pour appréhender avec précision la vulnérabilité.  Comme premier intrant, ces données comprennent les noms, l’emplacement et la taille des centres peuplés, obtenus de données de recensements nationaux.  En deuxième lieu, il faut aussi inclure et évaluer l’information sur l’infrastructure physique, comme les rues, les unités résidentielles et les immeubles commerciaux, obtenue des agences d’état responsables de l’octroi de permis et de l’entretien de l’infrastructure. Ces bases de données doivent être liées de manière dynamique et mises à jour quasiment en temps réel, car la vulnérabilité et les profils de risque changent fréquemment.  .

 

Cependant, la vulnérabilité macroéconomique face aux risques naturels est fondée sur cinq conditions de base, qui peuvent être classées suivant l’emplacement et le moment spécifique.   Elles comprennent: le genre de risque naturel, la structure globale de l’économie, la taille géographique d’un pays, le niveau de revenu et le stade de développement du pays et la situation socioéconomique qui existe, y compris, l’environnement politique au stade de l’économie.  Compte tenu des critères précédents, la vulnérabilité n’est donc pas seulement une fonction des évènements de risque et de l’espace physique, mais aussi leur intersection avec d’autres variables sociales et économiques.

 

Outre la localisation et la cartographie de la vulnérabilité physique, il faut donc ajouter les données géospatiales aux autres données socio-économiques et démographiques, afin de faciliter la prise de décisions éclairées par les décideurs. Une couche de liaison de données sur l’utilisation des sols sert d’intrant primordial dans le cas de la représentation graphique des variables socioéconomiques.  Une étude de l’INGC sur les Infrastructures des données spatiales indique que “Les zones à risques peuvent être sous-divisées suivant les activités économiques, comme l’agriculture, la foresterie, l’industrie minière, les loisirs, le transport, ainsi que les secteurs industriel, commercial et résidentiel.” Par ailleurs, d’autres indices économiques comme le revenu par habitant, le taux de chômage, le taux de propriétaires de véhicule et le pourcentage de résidents qui possèdent une propriété personnelle et une assurance commerciale, constituent des indicateurs importants de l’habileté de récupération d’une population après une catastrophe.  Ce genre de données est généralement  indiqué sur les tableaux de recensement ou les déclarations annuelles de revenus et pourraient être aussi incorporées à la plate-forme.

 

Lorsqu’on examine les communautés considérées souvent comme ‘vulnérables’, l’analyse des indices statistiques mentionnés ci-dessus indiqueraient qu’il y a des conditions sociales spécifiques que exposent certains groupes sociaux à un potentiel d’être plus endommagés en cas de catastrophe, ce qui limite donc leur capacité d’y faire face.  Sur le plan régional, malgré l’urbanisation croissante, une grande partie de la population de la Caraïbe habite ce que peut être considéré des zones rurales, loin de la portée des politiques conçues pour la réduction de la pauvreté et retirée des possibilités d’emploi.   Le manque de règlements a provoqué l’acquisition de logements caractérisés par l’absence d’infrastructure publique, les logements dangereux et le surpeuplement. Cela fait que les risques de catastrophe sont concentrés de manière disproportionnée dans les ménages à faibles revenus et parmi les groupes traditionnellement marginalisés, comme les femmes, les enfants et les handicapés.    C’est le problème, comme les gens vont à la recherche d’une meilleure fortune, cela conduit à un genre  d’urbanisation qui entraîne une augmentation de la vulnérabilité. Ces mêmes personnes deviennent ainsi plus plongées dans leur impuissance et exclusion, ce qui renforce la pauvreté et sape le développement.

 

Il est donc clair que la vulnérabilité est en partie un produit social.  Dans le cadre d’une stratégie de développement économique sensible aux besoins des pauvres et aux risques, les stratégies pour la réduction des risques doivent être axées sur la réduction de la vulnérabilité économique des communautés marginales.  La résilience intervient ici comme une composante importante de la planification de la réponse, car elle est liée à la capacité de l’économie d’un pays d’absorber les pertes et de se relever. Par conséquent, pour examiner les questions de vulnérabilité il nous faut une approche pluridimensionnelle, compte tenu du fait qu’un meilleur niveau de résilience de la communauté conduit à une meilleure allocation des ressources publiques.  En outre, l’amélioration des moyens de subsistance de la population à risque oriente les indicateurs macroéconomiques et microéconomiques dans la direction correcte.  Les agences administratives doivent donc chercher à créer de nouveaux outils capables d’examiner d’un œil critique, avec certitude, les niveaux de risque des communautés, pour pouvoir focaliser les interventions, au lieu de faciliter uniquement des buts politiques.  

Avec la coopération du Mexique, qui préside en ce moment le Comité régional pour les Amériques de l’Initiative des Nations Unies sur la Gestion de l’information géospatiale mondiale (ONU-GGIM), l’AEC met en œuvre actuellement le projet “Renforcement de l’infrastructure d’information géospatiale”. Ce projet cherche à promouvoir la développement de l’infrastructure de données spatiales régionales moyennant le renforcement de la production, l’utilisation et le partage d’information géospatiale de onze pays de la Caraïbe et à intégrer ces derniers dans la plate-forme plus large de l’ONU-GGIM.  Dans le cadre de ce projet, ces pays ont participé à la quatrième session du Comité d’experts des Nations Unies sur la gestion de l’information géospatiale, conclue récemment et ayant eu lieu au siège des Nations Unies à New York.  Cela sert de précurseur pour leur intégration officielle au sous-groupe de l’ONU-GGIM pour les Amériques.

 

Aborder les facteurs de risque sous-jacents est un aspect crucial pour gérer de manière efficace les risques de catastrophe et assurer la résilience et la durabilité futures.  C’est dans cet espace que l’avantage de l’utilisation des statistiques et des outils informatiques devient évident, compte tenu que l’AEC travaille à l’établissement d’une plate-forme d’information territoriale de la Caraïbe pour la prévention de catastrophes.  Une planification efficace sur tous les fronts, tenant compte les données économiques, sociales et environnementales est fondamentale pour le renforcement des compétences humaines et la réalisation des objectifs de développement durable. 

 

George Nicholson est le Directeur du Transport et de la Réduction des risqué de catastrophe et Nayaatha Taitt est assistant de recherché en matière de transport et réduction de risques de catastrophe à l’Association des Etats de la Caraïbes. Tout commentaire ou correspondance peuvent être adressés à  feedback@acs-aec.org.